mardi 11 novembre 2008

SOUVENONS-NOUS DES MORTS AU COMBAT


Aujourd'hui la France se souvient.

Voici quatre-vingt-dix ans maintenant retentissait dans la clairière de Rethondes le clairon de l'armistice.

Après quatre ans de combats meurtriers, la France retrouvait l'Alsace et la Lorraine spoliées en 1871.

Ces monuments aux morts dont les pierres égrènent la litanie des noms de ceux qui sont morts au champ d'honneur pour que notre patrie fût libre ont servi d'instruction civique vivante à des générations de petits français.

Il n'est pas une famille qui n'ait été touchée. Pas un village qui n'ait fourni sa part et au delà de jeunes gens dans la fleur de leur âge.

Vingt ans après une autre guerre amenait le monde à connaître les pires barbaries de son existence, le génocide planifié au nom de la race ou de la religion, et faisait de l'atome un instrument de massacre.

Renoncements, atermoiements, crise économique, désignation de boucs-émissaires ont certainement préparé le terrain sur lequel la bête immonde du totalitarisme jeta ses crocs funestes.

Et pourtant en ce onze novembre, depuis fort longtemps, les chrétiens fêtent Saint Martin, ce soldat de l'armée romaine, qui, ayant à peu près l'âge des plus jeunes soldats de la première guerre mondiale, avait partagé son manteau avec un pauvre crucifié par le froid. La nuit suivante, Jésus apparaissait en songe à Martin vêtu de ce même manteau donné au pauvre.

Que peut-on proposer de plus éclatant comme signe de paix. Martin donne au pauvre tout ce qui lui reste, car dans les règles de l'armée romaine d'alors, le soldat n'est propriétaire que de la moitié de son manteau, l'autre appartenant à l'empereur. Martin ne pouvait pas disposer à sa guise de la part impériale, mais il pouvait donner ce qui lui appartenait en propre.

Martin a tout donné.

Ces soldats dont les noms sont inscrits sur nos monuments, et les inconnus qui n'ont jamais été identifiés ont tout donné, ont donné ce qu'ils avaient de plus précieux, leur propre vie.

Leur mémoire mérite respect.


"Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie
Ont droit qu'à leur cercueil la foule vienne et prie."

Victor Hugo

Ce même jour du 11 novembre 1918, Georges Clemenceau, Président du Conseil, après avoir lu in extenso devant la Chambre des Députés le texte de la convention d'armistice, rendait hommage aux combattants et aux armées.
"Grâce à eux, la France, hier soldat de Dieu, aujourd’hui soldat de l’humanité, sera toujours le soldat de l’idéal ! "
Texte intégrale des minutes de la séance: http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/clemenceau/clem4.asp


A Angers, sous un soleil d'été de la Saint Martin, après la messe pour la paix célébrée en la Cathédrale par notre évêque Mgr Delmas, les autorités civiles et militaires ont honoré de leur présence la cérémonie traditionnelle au monument aux morts de la Place Leclerc, que les plus anciens angevins avaient appris à appeler Champ de Mars.
Ut pacem desideramus, sic parati ad illam defendendam esse debemus.
De même que nous désirons la paix, de même devons-nous être prêts à la défendre.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Hum...
Philippe, pourquoi cette référence religieuse face à cette évènement (je parle de la guerre) que l'Eglise, à défaut de cautionner, a largement soutenu (de chaque côté) en diffusant la propagande étatique et glorifiant les soldats qui partaient au front...
Oui désolé, je ne porte pas trop la religion (tout tendance confondue) dans mon coeur...
Tout ces pauvres poilus sont surtout mort pour pas grand chose (et je fais une nette différence avec la seconde guerre mondiale)

inmediostatvirtus a dit…

Cette référence religieuse pour moi n'est pas taboue, je n'ai jamais fait mystère sur ce site de mes convictions religieuses.
En pleine première guerre mondiale, le Pape Benoît XV avait lancé un pathétique appel à la paix. Seulement les belligérants ne pouvaient l'entendre.
Je ne crois pas que prier pour la paix soit nuisible, comme le fait l'Eglise aujourd'hui quand elle célèbre pour la paix en ce jour du 11 novembre.
Ces références religieuse font pour moi partie de ce à quoi je crois. Elles n'engagent cependant que moi.Chacun est libre de ne pas les partager commme de les partager. Cependant, je ne partage pas totalement ton point de vue sur ce point: je ne crois pas que l'on puisse dire que les poilus sont morts pour pas grand chose.
La guerre de 14 fut peut être une guerre impérialiste, mais, quelque part, je me dis que nous devons aussi au sacrifice des poilus une part de nos libertés.
L'histoire doit rester je crois une affaire de nuances.

Anonyme a dit…

Nuances oui c'est vrai.
La seule conséquence tangible de la 1ere guere mondiale fut la seconde... (avec entre temps la crise de 29 et la montée des fascismes et en parallèle celle de la puissance américaine)...
A part s'être tiré une balle dans le pied, je ne vois pas, honnêtement, ce que nous avons gagné avec la 1ère guerre mondiale

inmediostatvirtus a dit…

Je pense que la vision sur cet événement évolue avec le temps et les générations.
Les nôtres n'ont jamais connu l'occupation de leur pays par une armée étrangère, et c'est heureux, mais pour celles qui nous ont précédés, on a peine à imaginer quel traumatisme ça a pu être que de voir l'ennemi franchir les frontières.
Savons-nous comment nous réagirions?
Cela dit, je crois que l'on peut comprendre ce que cela était pour l'Alsace et la Lorraine de redevenir françaises.
L'Europe, construite au lendemain de la seconde guerre mondiale, est assurément facteur de paix. L'Europe ne serait que cela, et nous savons qu'elle n'est pas seulement cela, fait à nos générations comme un devoir de promouvoir l'idée européenne.

Anonyme a dit…

bonjour Philippe,
Je partage les remarques de Florent sur les conséquences et le résultat de la guerre 14-18.

Honnêtement, si l'Allemagne avait gagné, nous n'aurions pas pour autant perdu nos libertés, du moins pas très longtemps. Témoin, la fin des guerres napoléoniennes, ou celle de 1870 : après quelques années, les troupes d'occupations étaient reparties, avec beaucoup d'or dans leurs bagages c'est vrai, nous laissant à nous-même.

En 14, le but de l'Allemagne n'était pas de nous asservir, nous détruire ou nous coloniser, mais simplement de devenir la 1ere puissance mondiale de façon indisputée. Ca rappelle la doctrine US récente, par certains cotés ...

(tu peux lire mon édito pour la relation à l'europe)

inmediostatvirtus a dit…

Je crois que les différences d'appréciation viennent que chacun est plus ou moins sensible à certains aspects qu'à d'autres, que ce soit en histoire, en politique ou sur quantité d'autres sujets...
Il me semble que 14-18 clôt un cycle, celui des guerres dont l'enjeu est au départ interne à l'Europe et aux frontières des Etats européens.
Cependant qu'aurait été l'état d'esprit d'une France à nouveau vaincue en 1918, tellement la génération qui avait atteint l'âge adulte avait grandi dans le désir de venger le diktat de Bismarck. L'on peut imaginer le pire des scénarios de politique fiction et qu'entre autre la France humiliée se soit abandonnée à la merci du premier dictateur lui proposant monts et merveilles et réparation de l'honneur bafoué par une république incapable.
Au début du vingtième siècle, l'idée républicaine ne faisait pas consensus. Le ralliement des catholiques (et c'était à l'époque un parti qui comptait dans le paysage politique français) à cette idée républicaine était récent, et loin d'être partagé.
Or, précisément, l'idée républicaine s'est trouvée scellée définitivement dans le sang des tranchées.
D'ailleurs, l'Alsace et la Lorraine recouvrées, la république encore radicale et anticléricale n'a jamais pris le risque d'étendre la loi de séparation des Eglises et de l'Etat aux provinces redevenues françaises. C'était - comme on a pu l'expliquer - la concession de la république au ralliement quasi définitif de la majorité du parti catholique à une idée républicaine que plus personne ne pouvait contester.
Certes, ce sont les clauses du traité de Versailles qui ont exacerbé au moins en partie la montée du nationalisme allemand des années 30. Cela fait à peu près consensus chez les historiens. Mais il me semble que l'on (sans que ce on puisse recevoir une identité) a un peu trop tendance à occulter que l'idée républicaine s'est consolidée de fait pendant la guerre de 14 (au départ ce fut l'Union Sacrée).

Anonyme a dit…

Union Sacré ???
On a surtout assassiné ceux qui appelaient corps et âme à la paix !!!
L'Alsace et la Lorraine, c'était du bourrage de crane pour 3 générations... La France impérialiste et belliqueuse de Napoléon III n'a eu que ce qu'elle méritait.
Pour ce qui est de l'identité républicaine, c'est vrai, mais elle s'est plutôt forgée dans les tranchée, parmi les poilus, que dans la classe politique que tu décris: on parle de garder les cochons ensembles. Eux, ils ont connu la boue, la mort, l'horreur ensemble.
Quand à y gagner quelque chose, ah non ! Pour moi, le seul pays qui ait gagné quelque chose pendant cette guerre (à part les Etats-Unis, je veux dire autre chose que du matériel), c'est le Royaume-Uni qui a su prendre en compte un certain nombre de revendication de ses citoyens (point culminant: le vote des femmes).
La France, elle, n'a rien gagné.
Néanmoins, je te rejoins bien sur sur l'idée que nous nous faisons de l'Union Européenne.
Nous lui devons la paix depuis 60 ans en Europe de l'Ouest. Souhaitons que cela dure et que les hommes et le capitalisme qui va si bien à notre individualisme ait appris un minimum depuis la crise de 29, sinon, l'histoire, comme souvent à son habitude, se répètera...
Avec en plus une crise énergétique et une crise écologique et climatique sur les bras. C'est chouette le monde qu'on a créé n'est ce pas ?

inmediostatvirtus a dit…

Quand je parle de consensus autour de l'idée républicaine, c'est précisément l'idée que la cohabitation de poilus issus de toutes classes sociales, de régions variées a imposé de fait qu'on ne pouvait plus pour parler schématiquement opposer deux France. Une france contre-révolutionnaire et une France républicaine, radicale, laïque;...
Qu'on le veuille ou non, c'est un effet induit de la guerre de 14-18. Cependant, j'ai une autre vision de la France de Napoléon III, qu'on ne peut me semble-t-il pas réduire à la fin tragique du régime et à son côté belliqueux. D'ailleurs, une partie du pays a vu dans le désastre de Sedan une punition... que certains se hâtèrent d'interpréter comme divine (ceux qui en expiation firent construire le Sacré Coeur de Montmartre au fronton duque on peut lire "Gallia poenitens et devota"... La Gaule repentante et dévouée... Mais c'était la mode où l'alliance du trône et de l'autel était dans l'air du temps.
Son avance en ce domaine sur bien des milieux conservateurs de son temps fait que ceux-ci l'ont lâché à la première occasion. Sans son action volontariste, la France n'aurait pas si vite développé son réseau de chemin de fer. Paris, comme bien des villes de province, ont adopté les idées haussmanniennes, vastes boulevards où cohabitent différents modes de déplacement (comme quoi on n'a rien inventé dans notre 21 siècle si prompt à donner des leçons...), urbanisme assaini...C'est quand même l'époque d'un certain développement économique de la France, bref de l'entrée de la France dans la modernité. Et chose évidemment très gênante pour la doxa républicaine, c'est à lui qu'on doit le rétablissement du suffrage universel, certes par la voie du coup d'Etat du 2 décembre 1851, même s'il fut par la suite vicié par la pratique des candidatures officielles.