dimanche 9 novembre 2008

EST-IL OPPORTUN DE REPORTER LA LIMITE D'AGE DE LA RETRAITE?

Récemment vient d'être adopté à la faveur d'un amendement voté lors d'une séance de nuit le report de la limite d'âge en matière de retraite, dans les secteurs où celle-ci est opposable aux salariés. Actuellement de 65 ans pour le droit commun, il est question de la faire passer à 70 ans.
En matière de retraite, chacun sait que si l'on veut maintenir le niveau des pensions, les leviers d'action ne sont pas nombreux, soit on augmente les cotisations, soit on augmente la durée du temps de cotisation, soit encore on fait reposer sur l'initiative privée des salariés une part de leur retraite via l'adhésion à des caisses complémentaires facultatives. Et ces leviers d'actions déjà d'amplitude limitée ne sont pas compensés par une démocraphie florissante. La charge de cotisation travailleur-retraité aujourd'hui est plus lourde que naguère, et lorsque cette charge est trop lourde on crée les conditions d'une crise explosive cumulant les risques d'une baisse de niveau des retraites et d'une pressurisation extrême des revenus du travail, déjà ponctionnés par la fiscalité directe.
La crise monétaire doit inciter à la plus extrême prudence en matière de fonds de pension. Lorsque les mutuelles de retraite placent leurs fonds sur des placements lucratifs, pas de problèmes, mais quand ces placements lucratifs s'effondrent, ce sont les cotisants qui paient l'addition.
L'allongement de la durée du temps de cotisation n'est pas extensible à l'infini. Et maintenir au travail des travailleurs trop âgés n'est ni bon pour la santé ni pour l'économie. Surtout en une époque où le taux de chômage des jeunes est si important.
De plus l'entrée de plus en plus tardive sur le marché du travail va faire à terme l'effet d'une vraie bombe à retardement. Limite d'âge portée à 70 ans ou non, bien des salariés n'auront de toute façon jamais atteint les périodes de cotisation pour avoir une retraite à taux plein.
Il faut aussi avoir le courage de le dire si l'on veut se donner les moyens de sortir de ce cercle vicieux.
Raison de plus pour repenser complètement le système de protection sociale. Car ne nous leurrons pas, les cotisations patronales sont au final payées par les ménages.
Dans son programme présidentiel, François Bayrou avait été le seul à proposer la mise en place d'une TVA sociale dont le produit aurait financé le système de protection sociale. Lorsque le gouvernement Sarkozy a eu la velléité d'y penser, bien tard au demeurant, ce fut une levée de boucliers de la gauche, qui pour la nécessité du moment oubliait que la CSG était son oeuvre, avec y compris l'absurdité que n'étant pas déductible totalement du montant imposable, elle a pour effet de faire payer en partie au contribuable un impôt sur de l'argent qu'il n'a pas touché.
A la vérité, c'est l'abstention des gouvernements des années quatre-vingt et quatre-ving-dix de s'attaquer au dossier des retraites a créé les conditions d'une situation potentiellement explosive que les retraités de demain paieront au prix fort.
En cette matière sans doute plus qu'en d'autres, nos gouvernements ne retrouveront crédibilité que par des décisions qui reposent sur des constats partagés, des décisions expliquées, des efforts consentis à condition que cela ne soit pas en pure perte ou sans espoir de contrepartie certaine.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour Philippe,

transférer les charges sociales des salaires à la consommation me semble en effet une bonne chose, car du coup tout le monde cotise, et on décharge les entreprises d'une énorme contrainte administrative et financière. Et je suis pour cette mesure aussi.

Cela pose quelques questions, toutefois.
Q1 : pourquoi sur la consommation plutot que sur les impots ?
Q2 : les salaires doivent-ils êtres maintenus au niveau du brut (énorme augmentation du pouvoir d'achat) ou au niveau du net (nette amélioration de la compétitivité et des marges, donc potentiellement de l'emploi) ?
Q3 : quelles conséquences psychologiques aura la perte du lien entre cotisation visible et prestations ?
Q4 : que faire des organismes actuels de collecte, pour les salariés mais aussi pour les indépendants ?
Q5 : comment affecter les clefs de répartition aux organismes de gestion ?
Q6 : cela ne va-t-il pas créer un appel d'air pour le reste du monde à venir vivre en France, puisqu'il de fait il y aura une protection sociale universelle ?

Pas simple, pas simple ... et pourtant c'est la voie à suivre !

Anonyme a dit…

Pour ma part, même si je suis pour une augmentation de la TVA sauf sur les produits de première nécessité (ne serait-ce que pour limiter une consommation galopante de trucs inutiles que nous achetons et dont nous n'avons pas besoin et désolé pour la sacro-sainte - mais tout aussi inutile selon moi - croissance), je pense qu'il faut néanmoins augmenter l'âge de la retraite. Il faut tout d'abord arrêter les pré-retraites.
Désolé pour la "solidarité des générations" : pour qu'il y ait solidarité, il faut qu'il y ait une réciprocité: aujourd'hui, tout départ en pré-retraite éloigne un peu plus mon propre départ à la retraite (je n'ai déjà pas grand espoir d'en avoir une).
Et l'argument de maintenir des travailleurs trop âgés soit mauvais pour la santé et l'économie, il ne tient pas: désolé, l'espérance de vie après le départ à la retraite avoisine ou dépasse les 30 ans (dont pas mal en bonne santé) on peut encore travailler quelques années non?
Moi je proposerai une augmentation automatique de 1 trimestre par an la durée de cotisation jusqu'à l'équilibre des comptes. C'est clair, c'est juste.
A la génération du baby-boom, ou plutôt celle des trente glorieuses, merci de penser aux suivantes à l'heure où vous planifiez votre propre départ !
(Désolé Philippe de ce ton volontairement polémique: j'aimerais bien qu'on demande l'avis de ma génération avant de tout donner à celle qui ne rêve que d'une chose aujourd'hui: continuer la fête un peu plus de temps encore...)
Florent

inmediostatvirtus a dit…

La question des retraites est une question minée depuis longtemps, par inaction de bien des gouvernements du passé.
A vrai dire, même si ce n'est pas politiquement correct de l'écrire, l'on ne peut pas faire autrement que de reporter la limite d'âge à 70 ans (cela ne veut pas dire obligation de partir à cet âge là...), mais si l'on veut que dans 20 ou 25 ans davantage de gens aient assez de trimestres de cotisations pour avoir le taux plein, ou s'en rapprocher, on ne peut pas faire autrement. Il me semble que proposer ce report de la limite d'âge est une mesure courageuse, et c'est tirer les conséquences des réalités d'aujourd'hui: l'entrée tardive dans le monde du travail.
Le pire aurait été de ne rien faire.
En ce qui concerne la santé, cela dépend évidemment des métiers, et il faudra probablement prévoir des possibilités d'aménagement de poste dans certains secteurs, voire des moyens de faire autre chose que ce que l'on a fait pendant la première partie de sa vie professionnelle. Mais pour tout cela, il faut que les partenaires sociaux puissent se parler.