La presse et les médias nationaux se sont fait l'écho de la polémique suscitée par un jugement rendu par la 1ère chambre du Tribunal de Grande Instance de Lille et donné un regain d'actualité à l'article 180 du Code Civil, qui entre autres dispositions prévoit qu'est recevable en sa requête d'annulation de mariage le conjoint lésé par une erreur sur une qualité essentielle de la personne avec laquelle il a contracté mariage, sous réserve que la cause soit portée devant la juridiction civile dans un délai de cinq ans à compter de la célébration du mariage.
Nul n'ignore que ce qui fait l'essence du mariage c'est d'abord la sincérité du consentement de ceux qui le contractent à partir du moment où il n'existe aucune opposition à la célébration du mariage.
Mais en le cas d'espèce, la qualité essentielle est bel et bien la dissumulation de la mariée sur sa virginité.
Appartient-il à un Etat laïc d'entrer dans l'argutie religieuse ou dans ce qui est d'abord une affaire privée.
Une chose est l'attachement individuel à la virginité avant le mariage, quand cela relève d'une adhésion libre et consentie à une foi personnelle, une autre est d'instaurer la capacité de la puissance publique à arbitrer ce genre de différend. Ce qui de manière intime engage une personne, un couple doit-il être la règle générale de l'Etat? N'appartient-il pas au contraire à la puissance publique de garantir l'équité entre les citoyens, abstraction faite de tout précepte religieux qui n'engage que les croyants envers eux-mêmes, et d'assurer comme cela doit l'être dans un état moderne l'égalité de droits entre les femmes et les hommes? N'appartient-il pas à l'Etat de ne pas donner prise à la prolifération de pratiques hypocrites où les remèdes seraient pires que les maux?
Admettre que pour la loi de l'Etat la virginité de l'épouse puisse être regardée comme une qualité essentielle, n'est-ce pas se référer à des systèmes de valeurs médiévaux? N'est-ce pas encourager des pratiques médicales dévoyées et créatrices de dérives lucratives où finalement l'expression "se (faire) refaire une virginité" masquera aux yeux d'une société hypocrite et rétrograde ses propres turpitudes d'un autre âge?
Ne serait-il pas opportun d'encadrer et de préciser les conditions d'application de la procédure en annulation de mariage?
Appartient-il à l'Etat et à ses juridictions d'exercer une forme de justice religieuse? N'est-ce pas la porte ouverte à une ségrégation communautariste encore plus accrue?
Qu'on le veuille ou non, il n'eût pas été pensable qu'un tel jugement eût été rendu il y a trente ans.
Sur bien des sujets, la France des années 2000 est donc bien plus conservatrice et hypocrite que le libéralisme avancé des années soixante-dix. Dans ce domaine, la gauche comme la droite portent leur part de responsabilité et de lâcheté.
2 commentaires:
Ha !
Merci Philippe de ce billet !
Il est si fatiguant de lire des commentaires qui au nom de l'indépendance de la justice, de la liberté de choix, du respect des textes légitiment ce que je considère aussi comme un jugement rétrograde.
Il s'agit effectivement d'un jugement de valeur sur une doctrine religieuse.
c'est inacceptable dans notre état laïque.
je trouve également absurde, d'un point de vue logique, un jugement qui considère comme essentielle pour la poursuite du mariage une qualité que le mariage est justement censé faire disparaitre :)))
la loi c'est aussi un projet de société pas seulement une garantie de liberté de tout faire stupidement.
a très bientôt
Jean-Philippe
Je souhaite revenir un instant sur le caractère réligieux de cette "qualité" de verginité avant mariage. Dire que l'Islam exige la verginité avant le mariage est une aberration. Il s'agit au fond d'une trandition qui remonte à l'époque tribale et perpétuer par une vision retréograde de la rélégion.
Par contre ce qui est vrai c'est la tromperie entre les conjoints avant l'établissement du contrat. Ici il s'agit d'un fait qui relève du domaine du droit.
Il m'est toujours désagréable de voir certains enfoncer les musulmans de France dans l'ignorance de leur réligion. Il faut distinguer ce qui relève des pratiques culturelles du véritable message originel de l'Islam.
Walid
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