mercredi 7 janvier 2009

"AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS"


L'après-midi de ce mercredi 7 janvier s'est tenue à Paris, au Palais de Justice, la rentrée solennelle de la cour de cassation.

Image d'archive:

http://www.archives.premier-ministre.gouv.fr/villepin/IMG/jpg/CASSATION_500.jpg

6 janvier 2006 : rentrée solennelle de la cour de cassation. De gauche à droite: Pascal Clément, Garde des Sceaux, Guy Canivet, Premier Président de la Cour de Cassation, Dominique de Villepin, Premier Ministre, Jean-Louis Nadal, Procureur Général près la dite cour.

A cette occasion le Président de la République a annoncé son désir de réformer la justice. Parmi les mesures annoncées la suppression du juge d'instruction et le transfert des pouvoirs d'enquête au parquet.
Les rapports, commissions, enquêtes n'ont pourtant pas manqué depuis un quart de siècle. Entre le rapport de la commission Delmas-Marty, et plus récemment les rapports du Procureur Général Viout et celui de la commission parlementaire installée après le scandale d'Outreau n'avaient pas été avares en préconisations. On sait ce qu'il en est advenu. Entre les voeux pieux de la commission parlementaire et la micro-réforme initiée par le dernier Garde des Sceaux de Jacques Chirac, c'est comme si la montagne avait accouché d'une souris.

Tout a été dit et son contraire sur la figure du juge d'instruction. Adulé lorsqu'il endosse la tenue du chevalier blanc pour traquer les turpitudes des puissants de ce monde, il est conspué et traité comme bouc-émissaire de toute une institution lorsque de monstrueux enchaînements de dysfonctionnements non seulement judiciaires mais surtout éthiques ont conduit au scandale d'Outreau, sans que jamais fût publiquement posée la responsabilité morale des politiques qui par leurs déclarations irresponsables avaient justement permis qu'on arrivât à un tel abîme d'iniquité.

Quand on veut tuer son chien on dit qu'il a la rage. Supprimer la fonction de juge d'instruction sans que soit posée dans toutes ses implications la question de l'indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir exécutif risque ne pas changer grand-chose.

Or sur ce point, le candidat François Bayrou, lors des élections présidentielles, avait me semble-t-il avancé une idée audacieuse: conditionner la nomination du Garde des Sceaux, à l'avis conforme de la majorité qualifiée des deux chambres, comme cela est requis pour la révision de la constitution, et couper le cordon ombilical entre le parquet et le gouvernement.

C'est à ce seul prix, celui de la nomination impartiale par une majorité qualifiée de la représentation populaire que le pouvoir judiciaire pourra échapper au soupçon d'assujettissement à l'exécutif.


Pour le reste des mesures, annoncées par le Président de la République, cela suppose comme préalable le rétablissement d'un minimum de sérénité dans les relations d'une profession qui semble sinon à cran, ou du moins sur une posture de soupçon, vis-à-vis de son autorité de tutelle.

Or, si l'on souhaite instaurer un habeas corpus à la française, cela suppose aussi que l'institution judiciaire dispose des moyens humains et matériels nécessaires à l'exercice serein de sa mission. Réformes de la carte judiciaire, utilisation des nouvelles technologies ne pourront jamais celer la criante insuffisance des effectifs, tant dans la magistrature, que dans les profession du greffe. Cela passe aussi par une meilleure considération matérielle et morale, comme pour toute profession. Cela implique donc qu'on y mette le prix et qu'avant tout on écoute, ceux qui de toute façon, in fine, feront vivre au quotidien l'acte de juger qui, ne l'oublions pas, s'accomplit "au nom du peuple français".

Il ne suffit pas d'avoir des ambitions, et nous ne sommes plus à l'époque, si tant est qu'elle existât jamais, de la pensée magique qui fait qu'il suffit de dire pour que les choses soient. Cela nécessite simplement que les missions régaliennes estimées indispensables à la pérennité de l'Etat et du pacte social voient leurs moyens sanctuarisés, pour ne plus être à la merci des vicissitudes de l'annualité budgétaire. Cela vaut pour la Justice, mais cela devrait aussi valoir pour la Sécurité, la Santé et l'Enseignement.

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